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L’EXPERTISE DE GESTION

Dans un souci de transparence dans la gestion courante des sociétés commerciales de son espace, le législateur OHADA affiche clairement sa volonté d’offrir aux associés l’opportunité de contrôler la gestion qui est faite de leur entreprise par les dirigeants sociaux. C’est du moins ce qui ressort de l’article 159 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (AUSCGIE). Si le droit des sociétés commerciales prône dans sa globalité une liberté contractuelle, les moyens de bonne gouvernance introduits par celui-ci et qui consacrent l’intervention du juge en sont une exception. Ainsi, à l’image de la désignation d’un mandataire ad hoc ou encore d’un administrateur provisoire par la juridiction compétente, l’expertise de gestion est la conséquence d’une volonté exprimée par les associés d’une société commerciale afin de comprendre certains actes de gestion posés par les dirigeants de ladite société. Cette volonté est donc consécutive à une disposition légale qui assouplit la condition pour initier ladite action.

Par définition, « l’expert est une personne compétente disposant d’une expérience sur un sujet donné. Au sens juridique, l’expert est la personne désignée dans le cadre d’une expertise, c’est-à-dire d’une procédure destinée à éclairer une autorité chargée de prendre une décision ». Selon Mattieu Zolomian enseignant-chercheur et maitre de conférences en droit privé et science criminelle, attaché temporaire d’enseignement et de recherche à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne, « L’expertise de gestion est un mécanisme propre à certaines sociétés (SARL, SA, SAS) permettant aux associés de demander en justice la désignation d’un expert et de bénéficier ainsi d’informations sur une ou plusieurs opérations de gestion ». Elle vise à apporter un complément d’information aux actionnaires/associés de la société en cause. Les conclusions du rapport d’expert ne sont pas contraignantes. Elles peuvent toutefois constituer une mise en garde sévère à l’égard de le ou les gestionnaires contrôlés. Il y a donc là un véritable pouvoir de contrôle de la part des minoritaires. Elle aboutit à la désignation d’un expert judiciaire qui intervient pour l’examen d’une opération précise. Son rapport vise à donner une appréciation globale de l’opération quant à sa conformité à l’objet social, à l’intérêt de la société, à son opportunité économique et à sa portée.

En effet, l’article 159 de l’AUSCGIE dispose des conditions de désignation de l’expert. Selon cet article « Un ou plusieurs associés représentant au moins le dixième du capital social peuvent, soit individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, demander au président de la juridiction compétente du siège social statuant à bref délai, la désignation d’un ou de plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion ». Si le texte paraît aussi claire dans sa disposition, la question se pose de savoir ce qui advient de sa mise en œuvre. Il s’agit globalement de s’interroger sur les conditions de mise en œuvre de l’action, de désignation de l’expert ainsi que la mission de ce dernier. S’agissant des conditions de mise en œuvre du mécanisme de l’expertise de gestion, le législateur fixe clairement non seulement la qualité des associés susceptibles de la porter mais également l’étendue des actes répréhensibles susceptibles de justifier l’expertise de gestion. De même, la désignation de l’expert ainsi que l’étendue de sa mission relèvent de la compétence du tribunal compétent. Par ailleurs, il convient de noter que la demande d’expertise de gestion est bénéfique tant dans la suivie de la société que pour la préservation des intérêts des associés.

De ce qui précède, l’analyse de l’article 159 de l’AUSCGIE permet de conclure à un corps de règles consacré pour faciliter la bonne gouvernance des entreprises dans l’espace OHADA. Dans tous les cas, à défaut d’emporter condamnation d’un dirigeant social la nomination d’un expert peut s’avérer dissuasive aux velléités de mauvaise gestion des dirigeants sociaux.

Syndie GANSE

Juriste Stagiaire au Cabinet SIR-Africa

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